mercredi 20 février 2013

Pauvre Lélian !...


C'est le pauvre Lélian qui a mis ses vers sur nos tables lundi 18 février. L'amant de Rimbaud et de sa cousine, le poète maudit de Metz, l'étrangleur de sa mère, rappelons les anecdotes qu'on veut pour causer de Paul Verlaine, c'est en tout cas avec le recueil Parallèlement qu'on a pu s'imiscer dans la vie tumultueuse de celui qui a côtoyé pendant toute son enfance les foetus de ses frères et soeurs dans des bocaux de formol. Mais ne nous affolons pas ! On l'a laissé nous parler des femmes et de leurs culs, ou bien de Sappho misérable. Quand nous avons abordé la forme de ses poèmes, nous avons senti notre petitesse devant la grandeur d'une telle effigie. Un peu de concentration, de détente, une bonne infusion de Verlaine, comme disait Goffette, et nous avons pu écrire tout de même...

Un sonnet renversé (le net-so) et une infusion de Verlaine...

Alysson.

Bulles girouettes sur la lune groseille
à t'égosiller dans les ruelles sombres 
Citadelle ou le démiurge

s'insurge pour si peu du nombre
ridicule abandon fragment d'hébétude 
et les feuilles tombent en prélude ... 

Noyé dans la tasse d'un délire
Givré, à la masse et d'un autre ailleurs
à trop inspirer l'allumette et le tueur
Ha ! Puis partir en éclat de rire ! 

Floutesque clown des lassitudes
Diffus parfum d'un trop bu
Confondu au bout d'un remugle
à traverser les échoués perdus


Lucie.

Infusion de Verlaine.

Verveine et Verlaine - quand laine et vers s'infusent,
Quand Sappho déchaînée en ton corps diffuse
Ce douloureux désir ; ton martyre l'amuse ;

Verlaine s'effrite et dans le plaisir s'enflamme :
Des corps alanguis passent, trépassent ; les femmes
Lui dévorent le genou et Rimbaud son âme ;

Verlaine s'envole et trop tôt sur le sol tombe ;
La Justice s'abat comme un jouet sur son monde : 
Son amant est parti, sa liberté aussi ;
Plus un corps alentour pour goûter son envie ;

Sappho plus encore sur lui fait son empire :
Son tourment se fait plus lourd, sa raison chavire ;
Son regard affolé tombe alors sur ses pages :
La sainte Ecriture est son nouvel engrenage.

Nicolas.

Infusion de Verlaine.

Dans les champs en été
Là où les semeurs dorment
A l'ombre des grands cyprès

Je marchais à pas de loup
Tel l'assassin du roi traître
Sans réveiller les fomeurs saouls

Dans l'herbe haute me penchais
Afin de dissimuler ma présence
Et ramasser toute la semence
De la verveine tant convoitée

Par le chemin, je m'en venais
Je recroisais les travailleurs du sommeil
Non sortis de leurs merveilles
Et à Charleroi tranquillement je me rentrais.

Marie.

J'ai bu ta peau comme d'autres à tes lèvres
Au secret des alcôves
J'ai lappé ton souffle dans l'alcool vrillé

Des villes
Des vies comme la mienne, combien en as-tu vues 
Enfant aux yeux moqueurs, au coeur battant des cils ?

Désir en robe noire au bord de la folie
Au creux de tes épaules j'ai posé mon espoir
Petite écervelée je croyais te serrer
Dans mes paumes pantelantes.

Mais tu étais poussière
Et ton silence battait mes tempes sans temps mort
Au sein de mon coeur les sens laissés sans terre
Ont rendu l'âme.

Chloé.

Dans les pages flottent encore des silphydes
Et des paysannes, le jupon retroussé,
Des parfums de verveine et des bouches humides.

Tout au fond des regards que les vents ont poussés,
Fusent et s'offusquent les morales violées
Par la débauche que Verlaine a dévoilée.

On parlait d'absinthe mais jamais de pastis,
C'était la révolution au nom des lois mutines,
Et les femmes chantaient et ça sentait l'urine...
Voilà le vrai destin assuré à vos fils !

Ah ! Le pauvre Lélian qui a rêvé de lys !
Le voilà dans sa tombe à manger des racines
de pissenlit, dans sa tombe ainsi il dîne,
Ses glaires trop épais, aussi sa syphilis.

Marc.

Infusion de Verlaine
Eau chaude dans mon cerveau
Des écrits de moutons pour des vers de laine

En fusion je suis, quand, sot
Je me sens partir par ce trop de fioritures
De l'or en pâture pour ces foires littératures

Foireux je suis, odieux je me fais
Quand sous la tenaille de l'alexandrin
Ces techniques de branle chagrin
J'accuse le coup par manque d'idées

Mais qu'importe, j'écris et j'attendrai
Mon tour, pour parler, illustrer mon pâle teint
Et au pire pas grave, je prendrais la porte du vilain
Arpenter ma solitude en cherchant réponse à ma portée.

Maël.

Sagittale  mon chibre
Dans ton con irascible
Déverse son sperme libre
Vers cette soûle inaccessible

Salope, ma petite salope
Je te salis à t'aimer
Dans cette alcôve toute propre
Où il fait bon de t'enculer

L'infusion de Verlaine
T'est montée à la tête
Ma jolie petite teigne

Par malheur tu oublies encore le sucre
Je te dresserai avec des vers de laine
Ou te défoncerai le cul pour te cracher mon stupre.

Florian.

L'Infusion de Verlaine

Ce n'est guère ma tasse, d'infuser mes vifs vers
Entre cruche et carafe, le contenu est même
Mais je ne veux boire ma prose dans un verre

Quel infâme tourment qu'un pareil récipient
Recueil gastronomique et somme astronomique
Car le thé que j'ai fait, au café m'a maté

Oh oh ! Je vous vois rire, bourgeois de pacotille
Vos tasses de diamant ne contiennent que du vent
Saint-John Perse, Valéry, ah vos tristes amants
Sont griffés par le temps, gonflés comme des billes

Pauvre Lélian demeure un horrible anagramme
Je vous l'accorde Émile, Jacottet n'est pas un ange
Ce pitoyable Paul me console et mélange
D'un élan érotique, me tisane à la came

Mathieu.

Nesso
In fusion de

Elle songe Saphô , à son songeur déraisonné, le bon rieur
Dicteur de ton, rongeur Lesbo Gréco olé, olé
C'est l'expresso, mon intention, grosse Séléné

Boire un café dans l'antre du cosmos, in extenso,
Manger tes seins, dans l'in globo, des phrases corolles mises mot à mot
Hélas, j'ai renversé dans mon nesso l'abbé béat, mon bon Seigneur Kaputt ! Chino !

Claqueur  de dent, de l'intuition je suis l'aîné
Furieux rameur, et une ou deux, fusions
Il rampe, malheur, le mal, encore, encore, encore dans l'infusion
Claquer c'est lancer des balles démantibulées

Jongleur de bancs Saturne et Olmedoww morflent sur l'asphalte
Hécate tremble et trempe jusqu'au Tartare
La cloche des morts, mal lunée, crevée dare-dare
Ses larmes, son flow primate, c'est son aînée, échec, et mat.

Théo.

L’Abbé de Batz

L'Abbé de Batz excédé par ce b-a-ba
S'est dit je cède cédéroms, des dés et œufs
Dieu m'est témoin jamais plus de messe là-bas.

Dédé arrive chez l'abbé, yeux dans les cieux,
Tout poudré cheveux ras, dit euh euh qu'i fait froid
Z'auriez pas pour moi mon Seigneur un truc de choix ?

Si dit l'abbé j'ai des Cds de rock anglais
De l'île de Batz et d'Abba des bas craqués
Une bure et un code wi-fi qu'j'ai haqué
Du lait rance des ronces. Ha ! Que vous êtes laid !

Pour vous mon cher Dédé, mon convive simplet
Je ferai exception décidé à manquer
Mon office. Voilà un expresso tout talqué
Un nesso ou tisane. Verveine avec du lait ?

mardi 5 février 2013

La grand voile sur l'océan ivre


Paul Valéry, le grand érudit, le trop érudit diront certains, a scindé les supporters en deux : d'un côté les réfractaires à l'opacité de ses vers, de l'autre les alchimistes des grandes phrasées. Faut-il lire la poésie qui a plus de cinquante ans ? Au-delà, la poésie doit-elle être le fait d'une élite intellectuelle ? Y a-t-il encore des personnes désireuses de connaître ces grands noms sans tomber dans un académisme pédant ? Il me semble qu'abandonner Paul Valéry aux académiciens et autres littérateurs, c'est se priver d'un extraordinaire bouillonnement cérébral poétique, c'est "jeter, comme offrande au néant, tout un peu de vin précieux...". Voilà pourquoi nous nous sommes efforcés d'apporter des textes abordables parmi le large corpus de Paul Valéry, parce que certains de ces vers sont foncièrement grandioses, même si pour les saisir, il faut les situer dans un contexte littéraire et les entendre plusieurs fois, jusqu'à absorption. Et encore nous sommes-nous demandé s'il était légitime que les philosophes se soient emparés de sa poésie pour en dégager le sens... Mais peut-il y avoir poésie sans idée ? Peut-il y avoir sens sans que ce sens prête à interprétation ? Et peut-il y avoir interprétation sans une dose de philosophie ? Peut-être que tout est prétexte à sens, puisque le non-sens lui-même pose la question de son propre paradoxe. 
Après avoir chaviré dans l'océan valéryen, heurté la dérive et laissé quelques réflexions en flottement, nous avons écrit "la mer"... Et d'aucuns sauront lire combien ces poèmes savent tisser la voile de la vie humaine...



Bent

Les noyés se perdent parfois
ils se font trainer par de lourdes formes
qui traversent la coupole de l'univers
Celles qui tombent météoriques de temps en temps
elles sont comme des démons, en chair, en fer, en bois
Et les dépouilles des noyés se perdent en enfer
dans le cauchemar aride et lourd de l'au-delà
il les contient tous, le continent
loin de nous, condamnés, pour ne plus jamais flotter.
Mais Dieu étire des doigts vers l'enfer
vers les plus lointaines montagnes
et des grottes infinies
pour reprendre les esprits noyés
qui lui appartiennent
comme nous lui appartenons
comme tout lui appartiendra.

Paul

Grande mer par soleil couchant

Océan de larmes et de sang
laissant passer des navires sombres
sous un soleil rouge éclatant
bien loin des docks, dans la pénombre

Sorti des brumes, un bateau avance
sur les étales de la lagune
il s'éloigne doucement de la France
parti en mer pour bien des lunes.

Les mains ivres et en transe,
sur le grand mât vident les tonneaux.
Brouillard, tonnerre sur le radeau,
le ciel ici vide sa vengeance.

Petit clapotis, grande vague, et puis rien...
Demain nous serons samedi
le ciel sera bleu
et ils seront bien.

Puis dimanche, fin de l'accalmie,
nouvel orage, nouveau décor. 
Ils passeront sur vents et marées,
ils passeront quel que soit leur sort.

Ils étaient quatre mille,
ils ne seront plus que cent.
Je vois à l'arrivée
leur peaux bleues ou en sang.

Larmes du monde !
Océan de misère !
Fille bleue vagabonde
court au-dessus de la terre !

Fais ruisseaux et rivières,
fais la vie qui abonde,
"la sainte pécheresse",
la planète est son monde.

Soleil rouge sur bleu ciel,
soleil rouge sur bleu sombre,
pluie qui tombe à la pelle,
éternelle vagabonde,
mer porteuse, mer plurielle,
mers fécondes.

Chabat

Quelle étrange mère à jamais
Bercera nos âmes, errant dans les solitudes abyssales.
Conscients de notre perte, dérivons vers l'immense terre.

Finitude de l'amour humaine,
Devant le vaste des flots quasi éternels...

Florian

Fixant la vague
Au cloche-pied de ma vie
Engazé, enragé,
Je mime le vide

Nénuphar filandreux à mes doigts de diva
Je divague et surnage
Euphorique mais rude

C'est assez des cétacés
Je vénère ses fruits
Je renie ses enfants avant
De boire son ignominie
De la recracher et la bénir

Oublie le tempo Potenkine
Soviétiques et ricains n'ont jamais pu te violer
Car tes secrets utlramarins
A tes profondeurs intra-utérines
N'ont été révélés
Qu'à mes mains de mendiants maudits

Noyé dans mon scaphandre pharaonique
Ton puits se fait pyramide
Niché au creux de tes intestins
J'attends la déjection torride
Poussière de merde
René de la mer
Je vole et virevolte
Entre voûtes et vertiges.

Théophile

Dans l'infinie plénitude de la mer flottent
les baisers clapotants.
Un soleil carnivore s'allume
et refléte nu une mer d'huile s'anime
comme Narcisse.
Les mains serrent contre leur coeur 
Les foulards au parfum de lavande.

Chloé

J'avais envie de bâillonner l'horizon pour entendre le silence, pour altérer les bleus qui se mêlaient au tout.
L'outremer et le cobalt un instant mélangés, dans l'équinoxe maritime, furent bientôt désunis par quelques taches blanches, en serpentins douloureux et las, sous de pesants talons.
Un million d'oiseaux flottaient dans le ciel, appelaient peut-être les abîmes profonds, et j'entendais l'orifice insondable au-dessous de leurs ailes.
L'iode craquait sous les coques immobiles.
Maintenant ma tête en absorbait les gazes vaporeuses et mes yeux se noyaient de l'humide aquarelle.

Marie

Amertume

L'amer a bercé au creux de sa gorge
La grotte enfouie de ses larmes d'enfant.
Il en connaît le goût légérement acide.
C'est celui des si, des cinémas menteurs,
Des cirés, sous la pluie, des mères aux
Cheveux blonds que les autres détiennent.
C'est celui des amarres qu'il n'a jamais eues,
Car il est né marin, sans port et sans parents,
Balotté par la houle des cris sans noms qui claquent.
Et puis un jour, il l'a vue.
Sa mère.
Elle avait la peau grise et les cheveux d'écume.
Dans son ventre de vague il s'est laissé glisser,
Et le sel a scellé ses lèvres pour un rêve.
La mer murmurant des berceuses
A refermé ses bras.
Et enfin
Au fond de sa gorge
L'amertume s'est tue.

Alysson 

Bulles d'océan, embarcation instantanée. Le naufragé des ondes stéréo coule. Ombre défragmentée des bruissements d'eau. Rêve trop bu, monstre repus. A mirer, farce facile, les nuages flous, il coule et se confond. Gerbe d'encre des moisissures submarines. Qu'y a-t-il aux tréfonds. Il arrive ! Et embarque tout.
Quoi ? Oui, tout, les ciels et le reste. Des grumeaux froids partout autour. Amphibie des cités perdues. Le rescapé respire et parcours les tours. Chercher en vain l'Astre déchu, déchet d'Aïché*. Poursuivre la ficelle, la quelle ? Froid irradiant se morfond la pâleur que les ronflements parfument la peur.

*Aïché est un personnage fictif et récurrent de mes proses. Il a la fâcheuse habitude d'avaler les soleils contre son gré. (note de l'auteur)

Tanguy

Sans nom sur la mer:

...Amer est ton hymne;
Et mes yeux sont de salpêtre;
Car l'amarre de ma rime;
S'est fait larguer par ton être.
Traître est le présage;
Très près est la fioriture;
Qui là sur ton visage;
Crache mes viles blessures.
La houle a chanté;
Et la bise est une tempête;
Là où la chair terre;
Car tu n'es plus mon épithète.
L'épitaphe de notre histoire;
Vient clôturer la saison;
La marée est basse, il est tard;
Et ma main touche l'oraison...

Marc

"Mère qui prend la mer, vers des horizons plus lointains, retrouver une terre."


J'ai l'âme vide
Car avide d'un amour
Que je n'ai plus.
Je suis là étendu
Sur la plage de galets
A contempler, air attristé
La mer...

Amertume qui me prend, qui m'agresse, qui m'étrangle.

Oui! Il y a cette colombe
Dans le ciel.
Brin d'espoir
Dans l'horizon mortifère.

Cimetière au loin
Champ de tombes.

Chante lumière!
Colombe hécatombe.

Accompagne-la
Transporte-la
Avec douceur et candeur
Car candide n'est pas la mort
Enfin je crois...
...Putain je n'sais plus.

Le navire mortuaire vogue
Vogue le flot des douces houles.


Sur cette plage de cailloux
Je construirai un temple
Et je ne lèverai plus camp
Dans l'espoir de te revoir
Dans l'espoir de renaître.

Mère, à bientôt
Toi mon sang
Toi mon être.

Gaëtan 

L'amer

Haut poète, pourquoi donc ne parles-tu à tous ?
Contemple, constate, nature et spectacle.
Qu'on tente ou qu'on se tâte,
ne rien proposer sinon des maux, débâcle.
Cons temples, églises.
Mer de pensées, de flots, logorrhées.
(je n'entends en ces vers que l'amer)
Ho ! poètes ! Parlez !
A moi, l'imbécile.
A elle, la sotte.
Contre vents démarrez celui de la révolte.
La frique
J'ai voulu regarder sous sa jupe, un jour. 
Le froc oui.
De ce genre de gens qui m'intriguent. 
Le froc oui, comme toi.
De ce genre de gens, aux mains, aux rides. 
Sous sa jupe alors.
Mais laquelle ?
Quelle frique ?
Une frique n'est jamais seule, monolithe.
Se rappelle à toutes les autres, la frique.
Le froc donc.
De la frique, oui.
Chercher la différence.
 Jouer au dieu des X erreurs sous sa jupe. 
Sous le froc de la frique.
S'y perdre alors.
Mais distinguer l'Homme, son froc et sa frique.

mercredi 30 janvier 2013

La Martinique hic et nunc


Aimé Césaire, le Martiniquais de la poésie aux yuccas bleus, s'est invité à la table du Mot Ment le 28 janvier. Alors  évidemment, au milieu du sale hiver nancéien, c'était quelque chose, la tiédeur insulaire. On a fait le tour du monde derrière les verres épais de Césaire :
"Te voici à Marseille au milieu des pastèques,
Te voici à Coblence à l'hôtel du Géant,
Te voici à Rome assis sous un néflier du Japon" 
Te voici à Nancy avec des poètes qui écoutent ta voix d'outre-tombe, Césaire. 

Alors on a écrit nous aussi, pour que tu entendes nos voix, quelques poèmes autour du thème de l'Afrique...


Afrique Afrique
ton sang bat
trop vite dans tes artères
ton sang mêlé aux eaux
du Nil a fait le jus
d'orange d'Europe
Ô vieux Cham que tes
dents ont du grincer.
Afrique portée par des
éléphants millénaires
Afrique oreille coupée.

Théophile.

***

En quadrillé, defragmenté, désert de soleil dépossédé.
Inconnu, mais riche en dedans.
Vaste solitaire, armé d'inquiétude. 
Dernier bastion, dévasté.
Astre pourrissant. 
Inspiration dévolue. Dépourvue de pensées. 
Méconnue, mais triste en dedans. 
Plate salutaire, plénitude stellaire.
A rechercher les trésors, et tomber encore.
Là ou tout résonne, pour commencer à recommencer par le début.

Alysson.

***

Afrique:

Le rêve africain
Ce n'est pas l’aborigène
Mais bien le gêne de l'humain
Le gène qui gène certains

Car l'image de l'être réel
Celui qui ne fait pas de fioritures
Et qui d'âme n'a pas d'armure
Leur renvoie à la leurd'image

Les leurres
Pour qui l'argent est une valeur
Amerthune, Amerthune
La Mère liberté et ses flots de thune

La terre Afrique
C'est une pause, une trêve
Dans cette vélocité de bordures
Débordante de férocité

Afrique, terre d'espoir
Qui a fait d'or l'ordure


Le rêve américain...

Marc.

***

Ladate


          Ladate...
            Colore les fibres fabrique
            des Bribes de Briques d'une case de Broc
     et Jaune collecte de pouces de pieds les peupliers
                        Ensable de pluie l'Histoire des peuples papous
                                                                                       panel
                                                                                       la paille
                        Ladate
               creuse coloquinte chaos
                           des koalas couchés
                                    Au cœur
                        Ladate
                 Groupée dans le galop glissant,
                                   Poli, sirènes contemplent
                        Barquettes en bas, des canotiers ancrés dans
     les maillons de cire embarcations claquées faites de
                               plaies de polystyrène
Silences, et morcelées, écope écope, ma mort scellée, écope les cris des
           Koalas                            Ladate
                                   Écope               Cartons cramés
                                       Rouge plastique et encerclé
Clac, Clac, Clac  
                      Le carillon, sonne, j'ai la colique
Noyau collé, la date, emballé dans ma cadence

Mathieu.

***


Allen à Tanger

De sa terrasse rasé de près
Allen compile et contemple
la pleine poésie du paysage
Africain

Le soleil tanne sa peau tendue de juif new-yorkais
Bronzé ou d'airain dans sa fantastique immobilité
Rétive à toutes transgressions tonitruantes

Allen que ta plaie est suintante
Allen que ton vide est trop plein de vers à appâter
Allen que ta gueule de pédé
Soit l'auréole de ta finitude accomplie

Car je n'éprouve que dégoût à mimer ton éclat
Quand je voudrais rimer avec éclat

Oh ! Allen libère ta limpide spasmophilie
Bill et Tijean recolleront tes morceaux
Éclate et craque ta dernière allumette
Sois la flamme de ton exactitude salvatrice

Le soleil fane et se pose sur l'épaule d'Atlas
Poussière de ci de là au gré des éternuements
Soulagée du poids de souvenir amer de la mère

De sa terrasse barbue et si loin
Allen crie
Allen écrit
Mais Allen fuit.

Florian.

***

Du fric ?
Même pas
Pourtant l'Afrique.
L’Afrique qui gueule
L'Afrique qui fuit
On le raconte raconte sans compter le connaître
On sait les feuilles qui sifflent
Et les poissons noirs mais
le poisson blanc est venu là
Il a teinté d'orange l'ocre des soleils
Il a blanchi de rage les mangues d'arbres bleus
Ici tout était chaud comme un abricot brun
Soudain sans soupir les bruits se sont brisés
Et il n'est plus resté qu'un silence élastique
Mais l'élan de nos sangs a rassemblé les lions
Nous les avons tressés sans cesse en espérant
Et un à un au son des jours
Nous avons vu les soleils réapparaître
Et les animaux rouges
Se repaître à leur ombre

Marie.

***

Hausse d'emploi en Afrique
Démographie en Afrique
Développement industriel en Afrique
Situation politique en Afrique
Famille et santé en Afrique
Histoire coloniale en Afrique
Préhistoire en Afrique
Alchimie et sciences occultes en Afrique
Immortalité...

Trois frères se donnent rendez-vous en Afrique
trois frères au nom d'oiseau
l'un d'entre eux se coupe la barbe à l'aiguille à tricoter
il se coiffe au crochet, il parle tout seul
Il parle tout
seul
Il a fondé des villes, baisé des femmes grosses comme les montagnes
Il a un chien, immortel lui aussi
qui ne donne jamais la patte
et cette prodigieuse bête
raconte des histoires dans la radio
avec le ton monocorde des chiens
Il répète tout le temps....


« Hausse d'emploi en Afrique
Démographie en Afrique
Développement industriel en Afrique..... »

Bent.

***

Afrique

Une petite boite avec un papier qui dit :
    « solidaire »
Et puis quoi encore ?
Afrique sur le paquet de café
Afrique sur la tablette de chocolat
Afrique sur la Manioc
Afrique sur les mangues
Afrique qui nous grignote
Afrique qui nous pique la langue
Afrique, Afrique, Afrique, Afrique,
Afrique, frique, frique, frique
Dans la petite boîte où c'est écrit
      « solidaire »
Pourquoi donner des sous, hein ? Pourquoi faire 
si c'est pas pour nous ?
Pour deux pièces qui se battent en duel 
autant ne rien donner ;
à chacun sa poussière.

Mais dans la soute à bagages
y a pas la boîte qui clique-tique
            Mais y a lui, là, par-terre, 
    recroquevillé, qui ne crèvera
            pas de faim, pas en Afrique,
            peut-être ;
mais qui crèvera de misère,
là-bas, en Europe
où s'agite la boîte en fer,
où c'est écrit "Solidaire".
Ou avant.
Même pas de petite monnaie
pour acheter la Mort
à moindres frais.
Rien sous les bagages,
au milieu de l'aéroport,
que lui, là, 
qui ne verra plus un nuage,
parce qu'il n'est déjà plus qu'un corps.

Chloé.

***

            Pas d'âge le son gong
            crache du purulent mâche j'ai le
            Rien.
            Sable bref coupe, rare et fier
            Rien
            Main qui pleut de bave qui s'allume
            c'est une torche sale
            Sombre sans teint
            Aveugle gratter la phrase crisser
            crisser syllabes – adage
            Rien. J'acariâtre, anonyme
                    Plus
            Pas plus               lu                  j'ai lu
                    lire la pluie
A sac met le monde lui ment ne lui offre.
Rien.      Des parodies de tumulte, des mulets
            Et
Rien. Le son con. Cong. Gong.
Cravache, bête, fait la vie
aux yeux clos, et sombre
réverbère, barbare.

Théo.